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Regroupement de tous les textes de Martial

Bomlumassimne

Dans ce petit royaume de l’Europe centrale du cinquième siècle, l’arrivée des huns fut une catastrophe et même un cataclysme. Dès que la rumeur annonçant Attila et ses hordes se propagea, la panique fut immense. Les hommes pensèrent tout de suite à prendre les armes et se défendre, mais en fait d’armes, ils n’avaient, surtout, que leurs houes et leurs fourches, et bien peu d’épées.

Bomlumassimne était un royaume paysan, de quelques milliers d’âmes, et la garde du roi ne comptait que bien peu de soldats, peu habiles au combat. Les femmes voulurent se cacher ou s’enfuir, mais où ?

Sur les pentes qui descendaient jusqu’au fleuve s’étageaient les oliviers au feuillage argenté et à proximité existait une grotte sous une cascade. La jeune Loutsamine s’y réfugia avec d’autres jeunes filles, son amoureux Bloustan, et d’autres hommes de la ville, ayant le même souci de sauver leur bien aimée, les y conduisirent en transportant un lot de provisions et en leur enjoignant de rester dissimulées. Eux, les hommes allaient se battre et défendre le royaume, peut-être devant leur résistance les Huns se retireraient-ils ? Si ce n’étaient pas le cas, et si tout était détruit, du moins les jeunes filles seraient préservées, et quand les hordes d’envahisseurs se retireraient, elles pourraient regagner la ville, et contribuer à ce qu’elle renaisse.

La ville fut rasée, tous les hommes furent tués. Les Huns se retirèrent, poursuivant leur marche vers l’ouest. Et les jeunes filles sortant de leur cachette, tentèrent comme le leur avait demandé  les hommes de reconstruire leur vie, et la ville.

Mais plus d’homme, pas la moindre trace d’homme. Elles devinrent un peuple d’amazone, chassant, travaillant, s’exerçant au combat, construisant une république de femme. Mais la question de la postérité se posa, car si elles laissaient s’écouler le temps, dépourvue d’enfant la ville s’éteindrait.

A quelques lieues de là, le royaume de Nissembammoule avait également subi la destruction et le ravage des Huns, seule deux jeunes servantes avaient pu en réchapper.

Elles gagnèrent Bomlumassimne dont la réputation s’établissait sur tous les alentours.

Toutes deux, enceintes, donnèrent naissance à de beaux enfants, une fille et un garçon. La vie continuerait. 

Satire sur des ambulances

L’or, même en sa laideur, donne un teint de beauté
Disait l’ami Boileau sans crainte de fauter
Car la’or, comme l’argent, embellissent les gens
Ou leur donnent du moins un lot de courtisans
Tel répugnant, gros, laid, réputé comme porc
Pendant nombre d’années, fut célébré si fort
Qu’on le fit parangon des fA?tes d’Hollywood
Alors qu’il consommait starlettes en fastfood
Un autre, politique, expert en la finance
Et se voyant déjà président de la France
Fricotait en Belgique avec des malfaisants,
Femmes on lui offrait comme graine à faisan,
Une attitude un jour très inappropriée,
Qu’il eut en Amérique avec une employée,
Un viol plus qu’avéré, lui préta des millions
De dollars, et surtout quelques humiliations
La principale étant de rentrer dans le rang,
Mais de prison, na’en parlons plus, fermons le ban.
Car pour les tout puissants de richesse pourvus
L’oubli da’immunité n’est pas du tout prévu
Les journaux les médias n’aiment que ce qui brille
La dorure souvent la pire ordure habille
Et quand elle s’écaille on détourne les yeux;
La justice ne vaut que pour les gens de peu.

Larissa

Violet, fut le rayon de tes yeux, l’oméga
De Rimbaud, toi divine, au regard si profond
Que des soleils noyés en abymes sans fond
Pailletaient de lueurs dorées en agrégats

Capables d’attirer tant d’amours renégats
Se perdant aux mystères  les jours se défont
 devient sans valeur tout ce que nous offrons,
Rien ne reste de toi que ce que tu léguas:

Ton visage et tes mots, ton sourire et ta voix,
Éternelle beauté, digne d’un haut pavois
Je te rends mon hommage en ce superbe automne

les arbres en feu s’allument sur tes pas,
A Paris, Yssingeaux, et jusqu’au Kamtchatka
Mêlant l’orange au vert, le rouge avec le jaune

Un souvenir

 

Ils ont ramassé des pierres, des grosses, des moins grosses,
des rondes, des tranchantes

 

La tache dorée prend sa forme, j’en trace le contours
en orientant la feuille pour guider gouttelette sombre
Et ce fut au séchage comme une gueule dévorante,
absorbant un soleil fondant
Et puis je vis un ours au pays des inuit.
Un ours blanc, qui est jaune sur la page banquise
rien ne pêche, hormis les mots que l’on dégèle.

Mais voilà que plus haut, je distingue un œil bleu
Qui change la silhouette,
Certes il manque la trompe et les grandes oreilles

Ils ont ramassé des pierres, des grosses, des moins grosses, des rondes des tranchantes

Oui, c’était à Thoiry, dans l’ombre des années
Je ne sais plus ni quand, ni avec quel enfant
Ou femme d’autrefois,
Mais je me souviens bien du geste de ces grands
Mammifères captifs,
Au-delà du fossé
Sans barrières, sans murs,
Ils se tenaient au bord
De leur grand promontoire
Et ramassaient des pierres
Avec leur trompe habile

des grosses, des moins grosses
Des rondes, des tranchantes

Et les jetaient vers nous,
La plupart au ravin
Quelques-unes plus loin,
Presque nous atteignant
Les visiteurs perplexes
Allaient se reculant

Spectacle triste et violent
De prisonniers se révoltant

Dehors, dedans

Une barque, une lampe,
Sur l’eau, douce lumière,
Des ombres, des reflets,
Une barque le soir,
Une lampe allumée,
Le calme d’un tableau,
Silence, bruit des feuilles.
Sur le miroir, glisser…
La clarté des collines
Celle sous l’abat-jour
D’un losange au plafond
Découpé lumineux ;

Les grandes baies vitrées
Donnent sur la vallée
Et la rivière l’Ain
OA? la barque au ponton
Se retrouve attachéeî;
Et nous huit sommes là
Muets et immobiles
Comme vaisseaux fixés
Dans la salle d’étage
Au poêle ronronnant
Avec lampe carré
Fagot de bois flottant ;

Voyageuse pourtant
L’imagination va,
Dans le courant des textes
Sur le papier noirci
L’obscur sur nous descend
Comme douce enveloppe
Et le jour déclinant
Allume les sommets
La lampe notre amie
éclaire nos esprits
Voguant en poésie.

Le goût des bonnes choses

Le linceul noir de la nuit enveloppe la résurrection du jour.

J’aime les aubes de mauve ou de violette qui peu à peu révèlent les formes familières dans le jardin, qui se dégage lentement de sa brume nocturne ; la rosée habille les herbes, l’aiguail, les feuilles, de mille parures humides, qui scintilleront bientôt sous les feux de l’aurore.
Le vent, d’un léger souffle rencontre les tiges malhabiles des fleurs qui longent le vieux mur. Quelques oiseaux s’éveillent et lancent leur premier cris. Le soleil va percer les ombres de ses éblouissants rayons. De nouveau, il régnera sur le monde, déversant la splendeur de sa lumière sur toutes chose.

Je m’éveille. Je songe au déjeuner. L’odeur du café, du pain grillé finement beurré, un jus d’orange pressé, une bonne confiture.

Quelque chose d’indéfinissable. Le bonheur des jours tranquilles est dans l’air autour de moi. Je suis seul, et personne ne m’oblige à rien. Je me laisse vivre dans la paix, sans la moindre obligation, sans un bruit perturbant. La vie chante sa chanson douce.

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Adopter un livre

Tant de livres ! Qu’il est difficile d’en choisir. J’ai la nécessité de tous et ceux qui me restent à découvrir, sont aussi importants pour moi, que j’ai lu déjà et qui attendent ma relecture. En choisir un m’est impossible. Mais qu’un livre me choisisse, cela m’est arrivé avec les écrits d’Etty Hillesum. Ce fut vraiment comme une rencontre. Une rencontre préparée et annoncée.

Ce fut Sylvie Germain qui m’en parla la première, dans un ouvrage dont j’ai oublié le titre, elle évoquait ce nom, cette figure, et ce titre à Une Vie bouleversée. Le temps passa un peu mais l’évocation ne pouvait rester sans suite et je me procurai le livre. Je lus le livre par un séjour de neige, dans le Vercors et les flocons semblaient tourner les pages avec la légèreté profonde de la mélancolie alliée à la beauté et à la vérité Les Lettres de Westerbork, suivait ce résumé des onze cahier du journal des deux dernières années de vie (1941-1943)de la jeune amsterdamoise, décédée à 28 ans.

C’est un livre que l’on n’oublie pas et qui vous en demande encore davantage. Et je l’obtins quelques années plus tard, avec la parution cette fois complète et intégrale du journal (dont manque pourtant l’un des cahiers, disparu, à jamais ?) et de l’ensemble des écrits conservés, lettres, notes et documents.
Un ensemble de mille pages bien serrées, lues et relues, et puis cette décision peu à peu qui s’impose, reprendre en Poésie, chacun des cahiers, les traduire en mes mots, et les publier, faire partager, cette rencontre, ce compagnonnage, cette adoption.

Se meubler de livres

A partir d’ici l’histoire se complique, on pourrait même dire qu’elle commence, mal ; j’avais vendu le dernier des livres rares légués par mon oncle Xavier. L’antiquaire bibliophile qui me faisait vivre depuis toutes ces années m’avait fait comprendre qu’il ne me donnerait pas un radis (ce fut son expression) pour le reste de la bibliothèque immense dont j’avais hérité des livres de poche, des ouvrages de série noire, ou série rose, des bluettes récentes, des bouquins sans aucune valeur marchande, ni littéraire d’ailleurs, mais encore par milliers dans cet appartement légué lui aussi. Je ne songeais pas même à les lire. Que faire alors ? Me chauffer avec. Le papier brille mal, et ma chaudière à gaz ne me permettait pas cette fantaisie. En attendant, il fallait trouver de quoi le payer, ce gaz. Et la nourriture, les impôts, et tout le reste ?…

Avec cette foule de livres dont je disposais encore, je décidai de me construire un lieu de vie, et du moins de rentabiliser leur possession insolvable. Je vendis tous mes meubles et je construisis au centre de l’appartement une sorte d’Igloo fait de bloc d’ouvrages empilés, destiné à m’isoler du froid durant l’hiver, de la chaleur durant l’été. En réduisant toutes mes dépenses au minimum, en vivant d’eau et de pain, avec un peu de confiture ou de fromage bon marché, je pourrais survivre un bon moment, je ne voyais pas au-delà. J’avais peu de besoin, et j’aimais ne rien faire.

Une fois ma construction achevée, je pris mes quartiers, et passais dorénavant une grande partie de mon temps dans mes livres, littéralement. J’entrais par une sorte de tunnel et me glissait sur une couche de revues souples qui me constituait une sorte de grand lit sous des baldaquins de couvertures, entourés de murailles de pages. Je passais là bien du temps à dormir, et à rêver.

Peu à peu, je ne distinguai plus bien le réel, de mes cauchemars, la réalité des fictions. Je vivais dans un monde et un temps différents de ceux des autres hommes. Les lois étaient différentes dans cette époque incertaine, je ne devais de compte à personne, et tout était à disposition. Je sortais de temps en temps, et prenait ce dont j’avais envie, j’avais des aventures ici et là avec quelques femmes, et je voyageai au gré de mes fantaisies. La Nouvelle Guinée par exemple me plut beaucoup et je trouvais la coutume du nez percé pour y adjoindre un os décoratif particulièrement seyante. Le cannibalisme me convenant moins surtout à mes dépens, je fis quelques séjours au désert, là du moins la tranquillité du voyageur est le plus souvent garantie, mais l’on y rencontre néanmoins quelques chameaux pas toujours agréables, et l’on y a presque toujours soif. Les pôles me plurent d’avantages, avec ces charmantes otaries et les manchots empereurs tellement drôles dans leurs jeux de glisse. Les danses tahitiennes et les nuits auprès des vahinés m’enchantèrent également. Le charme des danseuses orientales, des chanteuses de fado, l’amitié des marins, des alpinistes, des aviateurs, et même des cosmonautes. Ah comme tout cela était bon. Finalement ma vie était très agréable. Mais un jour stupeur et effroi, la terre trembla autour de moi, les murailles de papier s’écroulèrent et m’ensevelirent… J’avais reçu un choc et je ne savais l’encaisser.

Etais-je mort ? Peut-ètre pas.
Eveillé seulement et c’était pire.

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UTIAK et MARIE POCHON

La Terre n’était pas encore la Terre, mais seulement une boule magmatique tourmentée d’explosions qui peinaient à séparer les océans et les iles volcaniques surgissant ici et là, construisant et détruisant des amorces de continents ; des vents solaires et des météores balayaient et frappaient sans relâche la surface du globe incandescent. La flotte aérienne de SKUIZAR qui survolait ces convulsions enflammées jugea l’endroit inhabitable, mais l’un des pilotes ne partagea pas cet avis, anticipant un devenir potentiellement viable, il enclencha son démodulateur temporel. UTIAK était un grand indépendant et tandis que toute la patrouille de reconnaissance exploratrice du secteur AB 36 dans l’amas d’amas 76B12 filait déjà vers une autre galaxie, il décida de poser son appareil sur cette planète peu avenante. Il fit avancer le démodulateur d’un quart de cadran, c’est-à-dire de quelque quatre milliards d’année L’estimation était assez heureuse et l’appareil se posa sur une boule verte et bleue à l’apparence stabilisée. L’appareil choisit de lui-mème une clairière dégagée au milieu des arbres innombrables qui couvraient à perte de vue de vastes territoires. UTIAK, sortit de son engin, èta son scaphandre de protection, et prit plaisir à respirer un air tout à fait sain avec une légère surcharge d’azote pas du tout désagréable et même un peu euphorisante. Son instinct ne l’avait pas trompé. Cette planète était habitable et plaisante son esthétique tout à fait satisfaisante pouvait en faire un lieu de villégiature fort agréable pour un SKUIZARIEN en quête de repos et de dépaysement. Mais il vit soudain surgir dans sa direction une troupe d’animaux étranges et gigantesques qui le déconcerta. Jamais il n’avait vu ni imaginé rien de tel : des bêtes aux corps monstrueux, interminables et é la gueule démesurée, avec des dents apparentes dont la taille dépassait celle de son engin spatial. Ces créatures, de toute évidence carnivores le considéraient comme une proie et s’apprêtaient à le dévorer vif.

Il réussit à rejoindre à la hâte son SUPERBEURK véhicule spatial dernier cri, bénéficiant des plus récentes découvertes des savants de SKUIZAR, et appuyant sur le bouton d’urgence il installa autour de lui un champ d’inaccessibilité qui le protégea de l’attaque furieuse de ces monstres. Les animaux imbéciles vinrent s’écraser et se renverser contre la coupole invisible édifiée pour protéger l’engin et son occupant. Tranquille dans sa cabine, UTIAK lança un appel au grand superviseur intégrateur du secteur sud d’AB36 qui avait la charge de réguler l’évolution de cette zone. On ne pouvait laisser les choses en l’état. Le dérangement était patent. Il demanda une intervention d’extinction en respectant la procédure et remplissant les formulaires. Il l’obtint dans un délai assez court de sa temporalité, qui correspondait à quelques millions d’années terrestre, et la nouvelle planète à peine découverte et répertoriée reçut un choc de force 5, percutée par l’astéroïde GB12-327K, opportunément détourné à cet effet. Le choc violent déplaça les pôles, et provoqua une retombée de poussière, des explosions, éruptions et dévastations telles qu’aucun des monstres à grandes dents ne survécut, et pas grand-chose d’autres à part quelques rongeurs dérisoires.

UTIAK, qui avait pris un peu de hauteur tenait néanmoins à son idée, et cette planète lui plaisait, il estima au jugé le temps nécessaire à un renouveau de la vie et poussa de quelques crans son démodulateur. Il se posa de nouveau. En France cette fois, en l’an de Grèce 1887, dans la cour de Marie Pochon, une fermière des Estables, au pied du Meyzenc.

Elle était en train d’écrire dans son journal poétique la phrase suivante :
à Ce qui part de ton cœur trouve toujours un écho. C’est dans le tien que je le trouverai.
Elle regarda rêveuse par la fenêtre ouverte et vit UTIAK descendre tranquillement de son SUPERBEURK posé dans l’enclos des cochons. Elle le trouva tout à fait séduisant avec ses petites antennes bleues intégrées au-dessus des oreilles et son superbe crane rouge métallique et luisant. Elle comprit immédiatement qu’ils allaient faire un beau couple dont l’histoire s’inscrirait dans la nuit des temps.