Archives de l’auteur : Martial MAYNADIER

La vie idéale

Il faudrait des bois, des fleurs, des oiseaux,
Un ciel bleu changeant, parfois des nuages
Un bateau, de l’eau, du sable et la plage,
Le soleil, la pluie, de grands animaux.

Je voudrais des cygnes et des corbeaux
Des bassins profonds oA? les poissons nagent
Des biches, des faons, comme en les images
Un pays magique ? tout serait beau;

J’aurai des chevaux, des chats, et des chiens,
Des amis parfaits, et tout serait bien
Avec une étoile, un soleil levant,

Des livres nombreux, et de quoi écrire,
Et de quoi penser, aimer et puis rire,
Peut-être une femme avec des enfants…

Bomlumassimne

Dans ce petit royaume de l’Europe centrale du cinquième siècle, l’arrivée des huns fut une catastrophe et même un cataclysme. Dès que la rumeur annonçant Attila et ses hordes se propagea, la panique fut immense. Les hommes pensèrent tout de suite à prendre les armes et se défendre, mais en fait d’armes, ils n’avaient, surtout, que leurs houes et leurs fourches, et bien peu d’épées.

Bomlumassimne était un royaume paysan, de quelques milliers d’âmes, et la garde du roi ne comptait que bien peu de soldats, peu habiles au combat. Les femmes voulurent se cacher ou s’enfuir, mais où ?

Sur les pentes qui descendaient jusqu’au fleuve s’étageaient les oliviers au feuillage argenté et à proximité existait une grotte sous une cascade. La jeune Loutsamine s’y réfugia avec d’autres jeunes filles, son amoureux Bloustan, et d’autres hommes de la ville, ayant le même souci de sauver leur bien aimée, les y conduisirent en transportant un lot de provisions et en leur enjoignant de rester dissimulées. Eux, les hommes allaient se battre et défendre le royaume, peut-être devant leur résistance les Huns se retireraient-ils ? Si ce n’étaient pas le cas, et si tout était détruit, du moins les jeunes filles seraient préservées, et quand les hordes d’envahisseurs se retireraient, elles pourraient regagner la ville, et contribuer à ce qu’elle renaisse.

La ville fut rasée, tous les hommes furent tués. Les Huns se retirèrent, poursuivant leur marche vers l’ouest. Et les jeunes filles sortant de leur cachette, tentèrent comme le leur avait demandé  les hommes de reconstruire leur vie, et la ville.

Mais plus d’homme, pas la moindre trace d’homme. Elles devinrent un peuple d’amazone, chassant, travaillant, s’exerçant au combat, construisant une république de femme. Mais la question de la postérité se posa, car si elles laissaient s’écouler le temps, dépourvue d’enfant la ville s’éteindrait.

A quelques lieues de là, le royaume de Nissembammoule avait également subi la destruction et le ravage des Huns, seule deux jeunes servantes avaient pu en réchapper.

Elles gagnèrent Bomlumassimne dont la réputation s’établissait sur tous les alentours.

Toutes deux, enceintes, donnèrent naissance à de beaux enfants, une fille et un garçon. La vie continuerait. 

Satire sur des ambulances

L’or, même en sa laideur, donne un teint de beauté
Disait l’ami Boileau sans crainte de fauter
Car la’or, comme l’argent, embellissent les gens
Ou leur donnent du moins un lot de courtisans
Tel répugnant, gros, laid, réputé comme porc
Pendant nombre d’années, fut célébré si fort
Qu’on le fit parangon des fA?tes d’Hollywood
Alors qu’il consommait starlettes en fastfood
Un autre, politique, expert en la finance
Et se voyant déjà président de la France
Fricotait en Belgique avec des malfaisants,
Femmes on lui offrait comme graine à faisan,
Une attitude un jour très inappropriée,
Qu’il eut en Amérique avec une employée,
Un viol plus qu’avéré, lui préta des millions
De dollars, et surtout quelques humiliations
La principale étant de rentrer dans le rang,
Mais de prison, na’en parlons plus, fermons le ban.
Car pour les tout puissants de richesse pourvus
L’oubli da’immunité n’est pas du tout prévu
Les journaux les médias n’aiment que ce qui brille
La dorure souvent la pire ordure habille
Et quand elle s’écaille on détourne les yeux;
La justice ne vaut que pour les gens de peu.

Larissa

Violet, fut le rayon de tes yeux, l’oméga
De Rimbaud, toi divine, au regard si profond
Que des soleils noyés en abymes sans fond
Pailletaient de lueurs dorées en agrégats

Capables d’attirer tant d’amours renégats
Se perdant aux mystères  les jours se défont
 devient sans valeur tout ce que nous offrons,
Rien ne reste de toi que ce que tu léguas:

Ton visage et tes mots, ton sourire et ta voix,
Éternelle beauté, digne d’un haut pavois
Je te rends mon hommage en ce superbe automne

les arbres en feu s’allument sur tes pas,
A Paris, Yssingeaux, et jusqu’au Kamtchatka
Mêlant l’orange au vert, le rouge avec le jaune

Un souvenir

 

Ils ont ramassé des pierres, des grosses, des moins grosses,
des rondes, des tranchantes

 

La tache dorée prend sa forme, j’en trace le contours
en orientant la feuille pour guider gouttelette sombre
Et ce fut au séchage comme une gueule dévorante,
absorbant un soleil fondant
Et puis je vis un ours au pays des inuit.
Un ours blanc, qui est jaune sur la page banquise
rien ne pêche, hormis les mots que l’on dégêle.

Mais voilà que plus haut, je distingue un A�il bleu
Qui change la silhouette,
Certes il manque la trompe et les grandes oreilles

Ils ont ramassé des pierres, des grosses, des moins grosses, des rondes des tranchantes

Oui, c’était à Thoiry, dans l’ombre des années
Je ne sais plus ni quand, ni avec quel enfant
Ou femme d’autrefois,
Mais je me souviens bien du geste de ces grands
Mammiféres captifs,
Au-delà du fossé
Sans barrières, sans murs,
Ils se tenaient au bord
De leur grand promontoire
Et ramassaient des pierres
Avec leur trompe habile

des grosses, des moins grosses
Des rondes, des tranchantes

Et les jetaient vers nous,
La plupart au ravin
Quelques-unes plus loin,
Presque nous atteignant
Les visiteurs perplexes
Allaient se reculant

Spectacle triste et violent
De prisonniers se révoltant

Dehors, dedans

Une barque, une lampea��

Une barque, une lampe,
Sur la��eau, douce lumiA?re,
Des ombres, des reflets,
Une barque le soir,
Une lampe allumA�e,
Le calme da��un tableau,
Silence, bruit des feuillesa��
Sur le miroir, glisser…
La clartA� des collines
Celle sous la��abat-jour
Da��un losange au plafond
DA�coupA� lumineux ;

Les grandes baies vitrA�es
Donnent sur la vallA�e
Et la riviA?re la��Ain
OA? la barque au ponton
Se retrouve attachA�e
Comme une A�le flottante ;
Et nous huit sommes lA�
Muets et immobiles
Comme vaisseaux fixA�s
Dans la salle da��A�tage
Au poA?le ronronnant
Avec lampe carrA�
Fagot de bois flottant ;

Voyageuse pourtant
La��imagination va,
Dans le courant des textes
Sur le papier noirci
La��obscur sur nous descend
Comme douce enveloppe
Et le jour dA�clinant
Allume les sommets
La lampe notre amie
A�clairenos esprits
Voguant en poA�siea��.

Le goA�t des bonnes choses

Le linceul noir de la nuit enveloppe la rA�surrection du jour.

Ja��aime les aubes de mauve ou de violette qui peu A� peu rA�vA?lent les formes familiA?res dans le jardin, qui se dA�gage lentement de sa brume nocturne ; la rosA�e habille les herbes, la��aiguail, les feuilles, de mille parures humides, qui scintilleront bientA?t sous les feux de la��aurore. Continuer la lecture

Adopter un livre

Tant de livres ! Qua��il est difficile da��en choisir. Ja��ai la nA�cessitA� de tous et ceux qui me restent A� dA�couvrir, sont aussi importants pour moi, que ja��ai lu dA�jA� et qui attendent ma relecture. En choisir un ma��est impossible. Mais qua��un livre me choisisse, cela ma��est arrivA�a�� avec les A�crits da��Etty Hillesum. Ce fut vraiment comme une rencontre. Une rencontre prA�parA�e et annoncA�e. Continuer la lecture

Se meubler de livres

A� partir da��ici la��histoire se complique, on pourrait mA?me dire qua��elle commence, mal ; ja��avais vendu le dernier des livres rares lA�guA�s par mon oncle Xavier. La��antiquaire bibliophile qui me faisait vivre depuis toutes ces annA�es ma��avait fait comprendre qua��il ne me donnerait pas un radis (ce fut son expression) pour le reste de la bibliothA?que immense dont ja��avais hA�ritA�ea��des livres de poche, des ouvrages de sA�rie noire, ou sA�rie rose, des bluettes rA�centes, des bouquins sans aucune valeur marchande, ni littA�raire da��ailleurs, mais encore par milliers dans cet appartement lA�guA� lui aussi. Je ne songeais pas mA?me A� les lire. Que faire alors ? Me chauffer avec. Le papier brA�le mal, et ma chaudiA?re A� gaz ne me permettait pas cette fantaisie. En attendant, il fallait trouver de quoi le payer, ce gaz. Et la nourriture, les impA?ts, et tout le reste ?…

Continuer la lecture