Marie Noël
Marie Madone
Tu n’es jamais
Sortie d’Auxerre
Ta vie recluse
En ta demeure
La croix clouée
Dans la poitrine
Si ta coiffure
Est d’une infante
Dans ton terroir
Sont tes racines
Et des nuages
En ton visage
Et des ramures
En chevelure
Ton jardin
Tu l’as dans le cœur
Ta face d’ombre
Est douloureuse
Mais sereine coté lumière
Et ton regard
Est clair et pur
Tu n’es pas
De ce pays-ci
Arrachée
Comme plante hors sol
Tu flottes pâle
En ton ciel rouge
Tes rameaux
Gagnent les hauteurs
Béantes
Au-delà de la toile
Ta nature
Est toute intérieure
L’escargot blanc
Du saint esprit
Se glisse en ta face cachée
Ravagée et vitriolée
Par l’angoisse
D’être une athée
Mais ta face droite éclairée
Met en valeur
L’œil lumineux
Qui donne sa lucidité
Il nous regarde
Sans nous voir
Ta bouche est belle
Et lèvre haute
Tu n’as pas besoin de parler
Ton buste entier déraciné
Porte message poétique
De résistances
Aux contingences
Aux aléas
De l’ici bas
Oui, Marie Noel combattante
Tu le fus dans tes vers, ailés,
Et ton visage fait songer
à certaines vierges bleutées
Qu’on voit aux tableaux du Greco
Alors que ce rouge et ce noir
Font rêver à Federico
Garcia Lorca, mort sous Franco
Toi tu te dresses
Catholique
A des sommets vertigineux
Ou seul un pape pourrait te suivre
Encor faudrait-il qu’il soit digne
Et vrai successeur de saint Pierre,
Et vicaire du Christ, en guerre
Contre bassesses de la terre
Que fixes-tu de ton œil noir?
Quelle fleur vois-tu dans le vide?
Une rose, un lys, un œillet,
La violette ou la pâquerette?
Mais avant de quitter la fleur,
Marie lui parle
Et nous sourit,
Et nous demande
A nous aussi
D’en appeler au jardinier:
Mais mon cœur
Qu’est-ce que tu faisais?